n° 35 - Le Patrimoine iconographique du Cadre noir
La naissance de ce qui deviendra le Cadre noir s’effectue
dans le premier tiers du 19e s. (1815-1825) soit peu avant
l’année retenue pour l’invention de la photographie : 1839. Les premiers
écuyers nous sont donc restitués via des pratiques picturales, celles-ci datent
néanmoins du vivant du cavalier.
C’est le cas de M. Cordier, écuyer en chef de 1825 à 1833 et dessiné par Charles Aubry pour son Histoire pittoresque de l’équitation ancienne & moderne dédiée à MM. les officiers-élèves de l’Ecole royale de cavalerie publiée en 1834. La fiabilité avec le réel est d’autant plus grande que Charles Aubry était alors un professeur de dessin au sein de cette même école. Cela a pu néanmoins entraîner une volonté de magnifier les cavaliers : ôter certains défauts et les présenter dans leurs meilleurs atours.

M. Cordier par Charles Aubry. Source : IFCE/Médiathèque du Cadre noir
Très rapidement cependant les écuyers du Manège de Saumur
profitent de ces innovations comme en témoigne un album : Les Ecuyers de l’Ecole
de cavalerie (1824-1906). On y trouve effectivement des photos d’écuyers
prenant la pose, en plan resserré, de pied ou à cheval, devant des décors ou en
milieu naturel.
Elles permettent d’observer la morphologie des chevaux de l’époque et les modes d’alors (queue coupée au pli de la fesse, quadrillage sur la croupe ; moustache à l’anglaise ou en guidon). Elles offrent également un visage à des écuyers dont parfois seuls le nom nous est parvenu.

L'écuyer Morgon (1888-1893) Source : IFCE/Médiathèque du Cadre noir
C’est à partir des années 1900 que la mode des cartes
postales se répand. Celles-ci sont utilisées comme un moyen de communication au
quotidien. Elles sont également un support de diffusion inégalable pour les
photographes. C’est grâce à ces cartes, devenues alors des objets
de collections préservés et transmis, que nous disposons de nombreuses
images de ce début du 20e s.
A Saumur et pour l’Ecole de cavalerie, les photographes les plus connus sont Blanchaud (père et fils), Francis Voelcker et les frères Neurdein. Les avancées techniques permettent désormais de prendre des images en mouvement. De nouveaux thèmes sont alors traités : les entraînements équestres, les sauts à l’obstacle (et les nombreuses chutes qui l’accompagnent), les carrousels, les courses.
Cartes postales de gauche à droite : Atelier Blanchaud, Reprise de Manège pendant un carrousel ; Francis Voelcker, Course de Verrie en 1902 ; frères Neurdein, Saut d'une haie au Breil. Source : IFCE/Médiathèque du Cadre noir
Dans la seconde moitié du 20e s. et le 21e
s., la baisse des prix, le gain en maniabilité et en autonomie des appareils
photographiques, le digital assurent une diffusion maximale des images qui deviennent peu à
peu une banalité quotidienne. Pour autant cette effusion photographique ne met pas
entièrement de côté les productions picturales plus artisanales. Le Cadre noir
fait ainsi l’objet d’estampes, tableaux mais aussi caricatures tout au long de
son existence. La représentation artistique présente toujours un attrait et
dévoile, selon les artistes, d’autres facettes des écuyers.

Au sein de l’Ecole nationale d’équitation, c’est dans les années 1980 qu’est recruté Alain Laurioux pour assurer la prise de photographies régulières à des fins pédagogiques, mémorielles et communicationnelles. Suite à son départ en retraite en 2021, cette mission est reprise par Benoit Lemaire. Ces images ne se limitent pas cependant à une prise de vue documentaire. Elles résultent et expriment un regard esthétique porté sur le Cadre noir.
Couverture d'un livre photo d'Alain Laurioux publié par l'IFCE.
D’un point de vue contemporain, cet héritage iconographique
offre un témoignage de l’évolution des uniformes et de l’anatomie des chevaux,
atteste d’éléments constitutifs de l’esthétique du Cadre noir : cravache à
trois viroles, selle à la française, nattage et harnachement bicolore. Il est aussi
une "preuve" de l'existence d’écuyers.
Il ne faut cependant pas oublier que ces
images résultent d’une sélection (choix du photographe ou du sujet photographié
de la garder ou non) et d'un hasard de conservation qui a permis sa
préservation au fil des époques. C’est donc un patrimoine fragmentaire qui n’en
reste pas moins porteur d’émotions et de vivant.
Pour aller plus loin
- Ouvrages de gravures
Albert Adam et Tom Drake, France - École de Cavalerie - Saumur, Javaud, 1869. En ligne : https://mediatheque.ifce.fr/index.php?lvl=notice_display&id=52812
- Ouvrages photos
Un photographe hors Cadre : Alain Laurioux, éd. IFCE, 2021. Acheter l'ouvrages : https://www.ifce.fr/produit/un-photographe-hors-cadre-alain-laurioux-le-cadre-noir/
Les Ecuyers de l'Ecole de Cavalerie 1824 – 1906. En ligne : https://mediatheque.ifce.fr/index.php?lvl=notice_display&id=17693
Ecole d'Application de Cavalerie - Saumur – France, éd. Blanchaud, 1922. Mise en ligne à venir : https://mediatheque.ifce.fr/index.php?lvl=notice_display&id=57476
- Cartes postales
Collection Blanchaud des Archives de Saumur : http://archives.ville-saumur.fr/f/fondsblanchaud/mosaique/?
Fonds de cartes postales numérisées : https://mediatheque.ifce.fr/index.php?lvl=cmspage&pageid=6&id_rubrique=342
Vous pouvez également consulter le site Gallica et y effectuer une recherche avec pour mots clefs "Ecole de cavalerie Saumur" afin de découvrir des photographies de l'Agence Rol.